Aussi bien pour les applications industrielles que dans la recherche, l'heure est aux modèles numériques « haute définition ». Il faut en effet prendre en compte des systèmes aux géométries de plus en plus complexes, et des comportements de matériaux basés sur des approches multiéchelles. Le recours au calcul parallèle est donc impératif.
En calcul de structures, les méthodes de décomposition de domaine sont un moyen naturel permettant d’exploiter des machines massivement parallèles, à mémoire distribuée. L’une des plus utilisées est la méthode FETI qui repose sur une «approche duale» consistant à introduire des conditions de raccord en effort aux interfaces entre sous-domaines. Elle présente aussi l’avantage d’être robuste et bien adaptée aux problèmes étudiés en calcul des structures. Cependant, des études faites sur de gros modèles (quelques dizaines de millions d’inconnues) ont montré que l'efficacité de cette méthode se détériore au-delà de quelques centaines de sous-domaines. Or, avec l’évolution de la technologie des microprocesseurs, on voit rapidement progresser de nouvelles architectures multi-cœurs, le nombre de cœurs disponibles dans un nœud doublant d’une génération à l’autre.
En coopération avec l'ONERA, le Centre Des Matériaux de MINES ParisTech exploite maintenant dans son solveur éléments finis ZéBuLoN un parallélisme à deux échelles, dans lequel chaque sous-domaine de la méthode FETI est lui-même traité en parallèle, au moyen de threads, au sein d'un noeud de la machine cible. Une configuration type utilise 1000 cœurs, avec 125 nœuds disposant de quatre processeurs dual core. Il y a une marge de progression énorme pour la technique, dans la mesure où les constructeurs annoncent des processeurs qui pourraient aller rapidement jusqu'à 64 cœurs.
Au cours de l'année 2009, le logiciel a été soumis à des tests intensifs dans le cadre du projet EHPOC de SYSTEMATIC. On a montré la parfaite scalabilité au cours d'une étude dont le grain est un maillage à 421 mille ddl, qui a permis de résoudre un problème plus de 164 millions ddl en moins de vingt minutes. Les tests d'accélération (SpeedUp) ont montré que l'on peut résoudre en une dizaine de secondes un problème à 3,3 millions de ddl.
L'image ci-dessous montre une application à un calcul de mécanique des matériaux, dans lequel on représente individuellement tous les grains de l'alliage. A gauche, la vue « explosée » des 27 sous-domaines qui ont servi à appliquer la méthode FETI. A droite, une image des déformations locales dans l'agrégat, qui sont la source des phénomènes d'endommagement et de rupture (Thèse de Ngon Can N'Guyen, coll. Fabrice Barbe et Andrey Musienko).
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